• DAMOCLES, NATOU NDONG

    [book] Damoclès ∞ Review

    F I C H E   D U   L I V R E

    Titre : Damoclès
    Auteur : Fatou Ndong
    Nombre de pages : 267 pages
    Genre : Roman sur la ségrégation
    Éditeur : Anyway, 2016

    S Y N O P S I S

      Madelyn Johnson, jeune afro-américaine de 17 ans pleine de vie, va malgré elle apprendre que tous les « blancs » ne sont pas tolérants face aux gens de « couleur ». Nous découvrirons l’évolution du racisme à travers les années avec les combats de Malcom X et Martin Luther King. Une histoire poignante qui vous poussera à réfléchir sur le racisme qui est malheureusement toujours présent de nos jours.

    (c) AMAZON

    M Y   I M P R E S S I O N (attention spoilers)

      On se retrouve aujourd’hui pour une nouvelle critique littéraire (oui, je sais, j’ai beaucoup de retard. J’ai d’ailleurs écrit beaucoup d’articles, mais je dois les relire pour l’orthographe avant de les poster et j’ai la flemme -_-). Je vais donc vous parler d’un roman qui m’a été donné de lire grâce à un partenariat littéraire avec Livraddict et je remercie l’auteur qui m’a envoyé son ebook.

       Alors, par où commencer… Déjà, je trouve que la couverture du livre n’est pas du tout attirante. Si je peux comprendre les raisons qui ont poussé à faire ce choix, il faut néanmoins admettre qu’il n’attire pas du tout le regard. Si j’étais sur Amazon à la recherche d’un roman à lire, je ne me serais jamais arrêtée sur cette couverture tellement elle est terne et fait peu professionnel. D’un point de vue strictement marketing, je pense que cette couverture est à retravailler (choisir de meilleures polices qui fassent moins « cheap » et « auto-édité », une photo plus réaliste avec des couleurs qui poussent le lecteur à s’arrêter pour lire le synopsis – car ce dernier est vraiment intéressant, mais je pense qu’on juge très souvent le livre à sa couverture à l’heure actuelle vu la multitude des romans qui sont à notre disposition).

    - Je rêve ou ce nègre me traite de menteur ? explosa James.
    La réponse eut le même effet sur le policier. Mais finalement, que pouvait-il dire ? Les deux réponses lui valaient de toute façon le même traitement. S'il affirmait que ce dont James l'accusait était vrai, il risquait sa vie et s'il répondait par la négative, cela signifierait qu'il le traitait de menteur et il risquait la même chose. L'agent jeta un oeil derrière lui, [...] Il décida qu'il valait mieux ranger sa matraque à sa place car trop de monde regardait.

       Ensuite, je trouve que le thème est très intéressant. Je ne sais pas si c’est le cas en France, mais en Belgique, on parle très peu de la ségrégation aux États-Unis. On passe toujours sur le sujet très rapidement et la plupart de mes connaissances sur le sujet ont été acquises par mes lectures hors cadre scolaire, mais j’avoue avoir encore beaucoup de lacunes sur le sujet. C’est d’ailleurs ce manque de connaissances qui m’a posé le plus de problème durant ma lecture. En effet, manquant de repères chronologiques, j’ai parfois été perdue dans le listing des événements qui apparaît dans le roman et par certains personnages que je ne connaissais pas très bien (notamment tout ce qui entoure Malcolm X et le mouvement Nation of Islam). Par conséquent, je pense qu’il aurait pu être utile de rajouter une page avec quelques informations chronologiques sur le sujet en annexe au roman afin de donner au lecteur l’ancrage nécessaire pour qu’il ne se noie pas. Ce serait d’autant plus utile que le roman mêle personnages historiques (secondaires) aux personnages de fiction, ce qui m’a encore plus emmêlé les pinceaux. Néanmoins, après coup, j’ai trouvé ma lecture très riche en renseignements, j’ai appris énormément de choses et je reste sur ma première impression : traiter de ce sujet en choisissant l’époque où les choses commencent vraiment à bouger (entrainant dans leur sillage une violence exacerbée) est un choix judicieux de la part de l’auteur (même si le passage avec le chien du vieil homme m’a brisé le cœur - mais il ne s'agit que d'un exemple parmi d'autres de la cruauté de l'être humain).

       Le thème et l’époque sont donc les gros plus du livre. J’ai aussi aimé que l’auteur traite du sujet à travers une relation (amoureuse ou amicale ?) interraciale, ce qui permet d’autant plus de souligner les rouages de domination dans la société de l’époque et les conséquences de ces unions. C’est d’autant plus intéressant d’avoir fait des protagonistes principaux des adolescents qui vont entrer dans la vie adulte car on remarque déjà comment ils ont été conditionnés par leur environnement, alors que lorsqu’ils étaient enfant, les différences ne se marquaient pas autant. C’était également une bonne idée d’insérer quelques passages des lois Jim Crow dans l’ouvrage pour montrer l’aberration du système mis en place (penser qu’il est resté en vigueur jusque dans les années 1960 fait froid dans le dos tellement c’est récent) et expliciter le comportement de certains personnages et certains événements du roman. L’intrigue secondaire (dispute du père des jumeaux et de son ancien associé) m’a semblé superflue. L’histoire se concentre vraiment sur l’aspect ségrégationniste de la société américaine du début des années 60 et ne pas déborder, ou alors mener à une véritable guerre politique dont l’égalité des « races » aurait été l’enjeu lors de la campagne pour la mairie, ce qui n’a malheureusement pas été le cas - ce qui renforce encore plus l'inutilité des personnages adultes en fin de compte.

       Si j’ai beaucoup aimé l’histoire et la façon dont elle est traitée (point de vue des adolescents), le problème principal réside selon moi dans la structure narrative. L’écriture de l’auteur est très fluide, ça se lit aisément, mais je n’ai pas compris la raison pour laquelle elle fait intervenir autant de narrateurs. J’ai du mal à apprécier les narrateurs-personnages et je dois avouer que j’ai été encore plus déroutée que le narrateur soit un personnage différent à chaque chapitre. Selon moi, ça a beaucoup décousu la narration et ça a instauré une certaine redondance notamment du fait que certains événements étaient relatés sous différents points de vue… Personnellement, je n’ai pas du tout aimé ce choix et je pense qu’il ne sert pas vraiment l’histoire, au contraire, il l’allonge, crée des longueurs et des points morts, ce qui est assez dommage car l’histoire est suffisamment riche pour ne pas tomber dans ce travers. Je pense que l’histoire aurait gagné en profondeur si le narrateur avait été omniscient ou s’il s’agissait d’un seul personnage (à la limite deux pour alterner le point de vue du Blanc et du Noir), ça aurait moins dispersé le récit et l’aurait rendu plus cohérent et aisé à suivre.

    Jamais je ne m'étais demandé quel était le nom de famille de tel ou tel nègre. Le surnom de nègre, d'ailleurs, je le connaissais depuis l'enfance et personne ne s'en était jamais plaint ! Mon père l'employait, ma mère l'employait et tout le monde autour de moi l'employait. Appelons un chat, un chat, c'était bien ce qu'ils étaient, non ?

       Si j’ai été séduite par le personnage de Madelyn, j’ai beaucoup moins apprécié les autres personnages. Déjà, j’ai trouvé qu’il y en avait trop, ce qui une fois de plus a contribué à disperser les choses, mais en plus, j’ai trouvé qu’ils étaient tous extrêmement antipathiques, même les jumeaux (même s’ils permettent de mettre en exergue les différents points de vue sur la question de la ségrégation).

       La fin, quant à elle, m’a laissée perplexe. Soit j’ai lu trop vite le roman, soit il va y avoir une suite car je trouve que de nombreuses questions sont restées sans réponse, ce qui est dommage (notamment la réaction de la mère dans le prologue qui est très ambiguë : quel événement a causé cette réaction de sa part ? Car plusieurs pourraient en être la source… Et surtout, qu’arrive-t-il à Madelyn et les frères Harper ?). C’est vraiment frustrant de terminer le roman ainsi, le prologue aurait dû apporter ces réponses plutôt que de donner des informations plic-ploc, sans réelle réponse, mêlant données historiques et fictives, ce qui m’a encore plus agacée car j’attendais vraiment autre chose (pour moi, soit il fallait conclure la fiction avec le dernier chapitre et faire un prologue purement histoire, soit il aurait fallu faire un prologue uniquement fictif).

    P O U R   A L L E R   P L U S   L O I N

       J'ai rédigé une critique sur le film "Selma" qui parle également de ce sujet, je vous invite à la lire en cliquant ICI. Sur la fiche, je parle de quelques ouvrages intéressants à lire sur la ségrégation américaine. Je rajouterai également les informations suivantes : 

    Lois Jim Crow (Wikipédia) ∞ Lois Jim Crow (RFI) ∞ Ségrégation dans les années 60 (Le Figaro) ∞ Ségrégation raciale (NOFI) ∞ Interview de l'auteur (blog de Grâce M.) ∞ Malcolm X (Wikipédia) ∞ Maya Angelou (Wikipédia, auteur)

    Merci à Livraddict pour ce partenariat.

    E N   C O N C L U S I O N

    ★★★☆☆   

       Pour conclure, je dirais que le roman est intéressant à lire, mais je suis beaucoup plus nuancée que certaines critiques que j’ai pu lire. Pour qu’il soit la perle décrite par certains, je pense qu’il faudrait revoir entièrement la structure narrative (un seul narrateur, approfondir l’aspect ségrégationniste, débarrasser le roman des à-côtés inutiles et surtout, donner une véritable fin qui ne laisse pas tant de questions en suspens). Certains éléments sont évoqués de façon trop superficielle, mais le roman reste riche en informations diverses sur le sujet et c’est une lecture agréable, on s'attache vraiment à Madelyn. Et surtout, il faut changer la couverture du roman ! Cette couverture est un gros point noir qui ne fait pas du tout professionnel et ne met pas le livre en valeur, ce qui est très dommage. 7/10.

    S.


    6 commentaires


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