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[book] Une Maison sur l'océan ∞ Review
UNE MAISON SUR L'OCEAN, BEATRIZ WILLIAMS
F I C H E D U L I V R E
Titre : Une Maison sur l'océan
Auteur : Beatriz Williams
Nombre de pages : 544 pages
Genre : Roman sentimental et historique
Éditeur : Belfond, 2018S Y N O P S I S
Des tensions de l'Europe en guerre à l'Amérique jazzy des sixties, Beatriz Williams livre un final palpitant, une magnifique histoire d'amitié et de passion, pour ponctuer la trilogie des sœurs Schuyler. À l'automne 1966, l'intrépide Pepper Schuyler est dans les ennuis jusqu'au cou : non seulement la belle est enceinte de son ex-patron, politicien influent qui la pourchasse à travers le pays, mais elle se retrouve seule et sans ressources. Son unique bien : une Mercedes de collection, qu'elle vient de vendre pour une coquette somme à une mystérieuse acquéreuse, Annabelle Dommerich. Il faut dire que cette célèbre violoncelliste française attache une valeur sentimentale particulière à ce véhicule. Elle seule connaît l'histoire de cette voiture, de sa course éperdue à travers l'Allemagne nazie jusqu'à son arrivée en Amérique. Et le destin des deux amants en fuite qu'elle abritait... Alors qu'Annabelle décide de prendre Pepper sous son aile et lui offre un refuge sur une plage déserte de Floride, les deux femmes se livrent peu à peu leurs secrets. Ensemble, parviendront-elles à affronter les zones d'ombre de leur passé ?
M Y I M P R E S S I O N (attention spoilers)
J’ai été un peu hésitante en me lançant dans cette nouvelle lecture car pour être franche, je n’avais pas du tout accroché au tome « Les Lumières de Cape Cod » qui mettait en scène l’une des trois sœurs Schuyler. Néanmoins, même si je n’avais pas du tout accroché à l’histoire de Tiny la sœur « Sainte Nitouche », l’histoire de la pétillante Pepper et le mystère qui entourait la voiture m’avaient beaucoup plus intriguée. Je ne pouvais donc pas passer à côté de ce roman si je voulais assouvir ma curiosité.
Ce roman se passe à deux époques différentes : en 1936 (jusque 1938) et en 1966. En 1966, on découvre la vie de Pepper, enceinte d’un homme marié, qui rencontre Annabelle lors de sa fuite ; alors qu’en 1936, on est plongé dans l’Europe de l’entre-deux-guerres et l’avènement du nazisme en Allemagne grâce au personnage d’Annabelle (qui rencontre Pepper en 1966). J’ai aimé comme le destin des deux femmes est lié et comment l’auteure alterne les deux périodes (avec des chapitres assez courts). Pourtant, ce n’était pas gagné d’avance car en général je n’aime pas les romans qui se déroulent à deux périodes distinctes.
Ça se passe toujours comme ça. On monte dans le mauvais train et on rate son arrêt, et puis on ne peut plus faire demi-tour. Le temps de revenir sur ses pas, le bon train est déjà parti.
Autant vous l’avouer franchement, je n’ai pas beaucoup aimé l’histoire qui se déroule en 1966. J’ai détesté que la narration soit au présent, ça m’a fortement dérangée jusqu’à la dernière page du roman et je n’ai pas du tout compris ce choix. De plus, je n’ai pas su accrocher au personnage de Pepper plus que ça. Si dans l’autre tome de la saga que j’avais lu, j’avais apprécié son franc-parler et son esprit libre, j’ai trouvé que dans ce roman-ci, elle était fade, stéréotypée, que tout était forcé… J’en ai retenu qu’une seule chose : Pepper est une bombe qui adore draguer sans aller plus loin. Si une telle liberté de mœurs peut être vue comme une avancée à cette époque, j’ai trouvé qu’au final, c’était tellement redondant que ça en rendait juste le personnage frivole : était-elle obligée de craquer pour les yeux de son médecin ?! De trouver sexy chaque homme qu’elle rencontrait ? Et après elle osait parler d’amour ? Laissez-moi rire : elle ne s’arrêtait qu’à la surface des choses, à la beauté de la personne, puis brusquement, ils échangeaient quelques piques et elle disait être amoureuse ? C’était beaucoup trop incohérent à mon gout.
Je n’ai pas beaucoup apprécié l’Annabelle de 1966 non plus (à croire que cette période était maudite pour les protagonistes de cette saga). Je l’ai trouvée beaucoup trop versatile, je n’arrivais pas à la cerner et ça a eu pour conséquence de la rendre très antipathique à mes yeux. Pour moi, la partie de 1966 devrait être entièrement retravaillée (voire supprimée) : il aurait fallu approfondir la psychologie des deux personnages (en particulier Pepper pour lui donner plus de profondeur).
Par contre, j’ai a-do-ré la partie qui se déroule en 1936-38. J’ignore si c’est encore mon « amour inconditionnel pour les contextes historiques » qui a frappé, mais j’ai beaucoup, beaucoup aimé. Déjà, la narration était au passé, donc beaucoup plus simple à suivre (quand elle était au présent, je butais quasiment à chaque verbe… une horreur !) et les personnages étaient beaucoup plus consistants, développés. J’ai aussi aimé la mise en scène de l’aristocratie française désargentée, leur mode de vie pendant les années folles et le développement de la Côte d’Azur en tant que lieu de villégiature d’une classe « privilégiée ». De plus, on découvre une période de l’Histoire dont on parle moins souvent dans les romans historiques : les quelques années qui ont précédé la Première Guerre mondiale et les premières mesures antisémites prises par Hitler. Ce roman permet vraiment de montrer l’évolution de la situation pour les Juifs en Allemagne : la prison, la perte de leurs droits en tant que citoyens, la pression économique et sociale. La Nuit de Cristal étant l’événement qui cristallise cette violence nazie. J’ai toutefois un peu regretté le cliché du « Riche Juif » : l’homme qui vivait sur un yacht luxueux, possédait une entreprise familiale florissante, avait des résidences secondaires et les moyens de fuir. Ce cliché fait un peu trop écho (à mon gout) aux stéréotypes et aux justifications des nazis pour s’en prendre aux Juifs à l’époque, c’est un peu dommage d’avoir fait appel à ce même imaginaire pour l’un des personnages principaux de ce roman.
C'est affreux et beau à la fois. Le pire, c'était le chien. Voir les gens était supportable, mais le chien m'a fait pleurer. [...] Parce que les gens comprenaient ce qui leur arrivait. Ils savaient que le Vésuve était en éruption, que la ville était perdue. Ils ne pouvaient pas s'échapper, mais au moins ils le comprenaient. Le chien, il n'en avait aucune idée. Il a dû croire qu'on le punissait.
Pour en revenir aux années 1960 et donc à la fin du roman, je dois dire que j’ai été très surprise par le déroulement des événements (et très déçue par la même occasion). Tout au long du roman, il y a un mystère qui entoure Annabelle et sa vie amoureuse, on ne sait pas exactement quelles décisions ont été prises par ce personnage attiré par deux hommes en même temps. J’avais néanmoins opté pour une des deux alternatives et ma déception fut grande en apprenant dans les toutes dernières pages que je n’avais pas fait le bon choix. J’ignore si l’auteure elle-même est restée indécise jusqu’à la fin et a finalement décidé de ce retournement (ou peut-être est-ce dû au fait qu’elle a dû réécrire une bonne partie du roman suite à un bug informatique), mais j’ai trouvé que cette révélation tombait comme un cheveu dans la soupe. Car du coup, oui, ça laisse entrevoir de belles retrouvailles, ça aurait pu être romantique, mais ce n’est pas du tout le ressenti que j’ai eu. Au contraire, j’ai eu l’impression que l’on s’était moqué de moi tout au long du roman et ce sentiment était très désagréable. De plus, une telle fin mène à tout un questionnement sur le sort des personnages (principaux et secondaires) : comment les choses en sont arrivées là ? Que sont devenus les enfants ? Et bien d’autres questions, toutes restées sans réponse : quelle frustration ! Ce sentiment d’une fin bâclée ne m’a pas quittée et ce, dès l’instant où Pepper a soi-disant retrouvé le bonheur. J’ai trouvé que c’était allé beaucoup trop vite, sa nouvelle romance était au final très superficielle à mon gout (un peu à l’image du personnage finalement).
Les chiens sont merveilleux, non ? Peu importe ce que vous avez fait, si un chien arrive à vous supporter, alors votre âme n'est pas tout à fait perdue.
Pour conclure, ce roman est en demi-teinte (mais me laisse un souvenir bien plus positif que le roman centré sur Tiny). J’ai beaucoup aimé les parties qui se déroulaient en Europe dans les années 30 et je les ai dévorées, j’ai néanmoins été déçue par les parties qui se passaient dans les années 60 : les personnages étaient beaucoup trop superficiels et il était difficile de les cerner, de connaître leurs véritables motivations et donc de les apprécier. La fin m’a également beaucoup déçue. Elle était surprenante, mais dans le mauvais sens et laisse beaucoup trop de questions en suspens pour le coup. J’ai malgré tout passé un bon moment en lisant ce roman (ne serait-ce que pour la partie dans les années 30 qui occupe plus de la moitié du roman heureusement). Pour moi le roman aurait été parfait s’il n’y avait eu que cette histoire, abordée plus en détails.
E N C O N C L U S I O N
★★★★☆
Un bon roman dans l'ensemble, même si la partie qui se déroule dans les années 60 m'a un peu dérangée (narration au présent, personnages pas suffisamment développés, évolution des relations trop rapide, beaucoup de questions sans réponse). La partie qui se déroule en 1936-38, quant à elle, vaut le détour et mérite que l'on s'y attarde. Sans cette partie, je ne pense pas que j'aurais mis une aussi bonne note, mais elle apporte vraiment une plus-value à l'histoire. 8/10.
Je remercie les éditions Belfond pour leur confiance. Il s'agit déjà du troisième roman que je lis pour leur bookclub du dimanche et j'apprécie toujours aussi ce rendez-vous. Si vous voulez y participer, il est encore temps de vous procurer le roman et de le lire pour le dimanche 9 septembre. Le bookclub aura lieu entre 10h et 16h, et ça se passe ICI (facebook).
Stéphanie
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