• [book] La Colline aux esclaves ∞ Review

    LA COLLINE AUX ESCLAVES, KATHLEEN GRISSOM

    [book] La Colline aux esclaves ∞ Review

    F I C H E   D U   L I V R E

    Titre : La Colline aux esclaves
    Auteur : Kathleen Grissom
    Nombre de pages : 428 pages
    Genre : Roman historique
    Éditeur : Charleston, 2015

    S Y N O P S I S

       États-Unis, 1791. Après avoir perdu ses parents lors de la traversée de l’Atlantique, Lavinia, une jeune Irlandaise âgée de 7 ans, se retrouve domestique dans une plantation de tabac pour rembourser son passage. Placée avec les esclaves de la cuisine, sous la protection de Belle, fille naturelle du maître, Lavinia apprend à faire le ménage et le service, guidée par l’amour et la force tranquille de sa nouvelle famille. Cependant, malgré tous ses efforts, elle ne peut faire abstraction de sa peau blanche et pénètre peu à peu dans l’univers de la grande maison. Lavinia parviendra-t-elle à chevaucher deux mondes que tout oppose ?

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    M Y   I M P R E S S I O N (attention spoilers)

       La Colline aux esclaves est un roman qui me faisait de l’œil depuis déjà pas mal de temps, mais le prix du ebook me rebutait un peu (je suis trop radine surtout pour un livre que je ne vais lire qu’une seule fois dans ma vie), mais je me suis quand même laissée tenter et je dois dire que c’est une petite déception (peut-être parce que j’en attendais trop).

       Pourtant, ce roman avait TOUT pour me plaire : le contexte historique et le résumé m’ont donné très envie de me plonger dedans. J’ai aussi apprécié le début de l’histoire. Néanmoins, j’ai très vite retrouvé la narration selon deux points de vue et ça, c’est une technique romanesque qui ne me plait pas des masses, en particulier quand elle se fait à la première personne du singulier… C’est une question de gout évidemment, mais ça m’a pas mal rebutée. Surtout que force est de constater que les chapitres selon le point de vue de Belle sont généralement beaucoup plus fins et moins développés que ceux de Lavinia, alors pourquoi s’acharner à ajouter son point de vue ? Lavinia aurait très bien pu le retranscrire et même si l’enfant ne voyait pas tout et ignorait certaines choses, un lecteur avisé aurait très bien pu faire les liens sans que cela nécessite l’intervention de Belle-narrateur. De plus, je n’ai pas aimé le temps utilisé pour la narration avec Belle. Je ne comprends vraiment pas pourquoi certains auteurs passent du passé simple à l’indicatif présent au sein d’un même livre juste parce qu’ils changent de point de vue… Personnellement, ça m’a énormément dérangée et rebutée. J’ai de loin préféré la narration au passé selon le point de vue de Lavinia (heureusement que c’était les chapitres les plus développés).

    Voilà ce que je sais. La couleur, le papa, la mama, on s’en fiche. On est une famille, on prend soin les uns des autres. La famille nous rend plus forts quand les temps sont durs. On se soutient tous, on s’aide tous. C’est ça une famille. 

       De plus, l’histoire en soi m’a déçue. Si j’ai aimé découvrir la vie dans une plantation en période ségrégationniste, j’ai regretté l’aspect dramatique du roman. Bien que je conçoive que c’était une période injuste et difficile, je ne comprends pas trop l’intérêt d’ajouter autant de drames dans un livre de fiction. J’aurais aimé qu’il y ait moins de drames, moins de morts, peut-être plus de moments tendres entre les personnages et une fin plus romantique. La fin m’a vraiment beaucoup déçue. D’une part à cause de la mort de l’un de mes personnages préférés et d’autre part, pour le destin de Will et Lavinia. (SPOILER : j’étais la seule à espérer que son épouse meure en couche pour qu’il retrouve son premier amour et qu’ils vivent heureux et fassent de nombreux bébés ?!). Même si je n’ai pas trouvé de grosses incohérences dans la construction de l’intrigue, je regrette qu’elle n’ait pas pris la tournure à laquelle je m’attendais (trop de coïncidences, de non-dits, de silences qui mènent à de mauvaises interprétations et donc à des drames).

       Toutefois, j’ai adoré l’aspect familial du roman. L’auteure permet de susciter une véritable réflexion quant à la notion de « famille » : seuls les liens du sang permettent de former une famille ? La réponse est évidemment négative comme le montre la relation qu’entretient Lavinia avec ses deux « mamas » malgré leur couleur de peau (appartenance ethnique) différente. Je crois qu’avoir mis un enfant au centre de la narration permet – grâce à son regard innocent – de voir les incohérences sur lesquelles la théorie ségrégationniste reposait. C’est un côté que j’ai vraiment apprécié dans ce roman et je pense que c’est ce qui en fait sa richesse.  

    Quand je lui donnai ses papiers, il les prit et détourna les yeux.
    — Tu es libre de partir, mais plus que toute chose, j'aimerais que tu restes. Je ne me sentirai pas chez moi sans toi. Je ne peux pas encore te payer, mais...

       Mes personnages préférés sont secondaires et il s'agissait de la mama et du papa de Lavinia. Je les ai trouvés très attachants dans leur façon de vouloir prendre soin de leur famille, ainsi que la famille qu’ils servent, tout en étant conscients de leur situation précaire en tant que « Noirs ». À mes yeux, ils font preuve de beaucoup de courage en essayant d’aider tout le monde comme ils le peuvent : ils ont une situation privilégiée en vivant près des « maitres », mais essayent d’aider les esclaves des cases comme ils le peuvent, ils protègent aussi la plantation comme si elle leur appartenait ainsi que les enfants des maitres. On voit à travers leurs relations comment ils sont titillés entre deux mois : leur situation est profondément injuste, mais ils s’attachent quand même d’une certaine façon à leurs « tortionnaires ». Les répliques de ces deux personnages étaient souvent remplis de sagesse et de perspicacité, c’était agréable d’avoir accès à leur point de vue.

       J’ai beaucoup moins aimé Lavinia. Déjà parce que pendant une bonne partie du roman, c’est une enfant taciturne et craintive. Je n’ai pas réussi à l’apprécier depuis le début et ça ne s’est pas arrangé avec la suite : elle était tellement naïve ! J’avais vraiment envie de la secouer pour qu’elle puisse voir ce qu’elle était la seule à ignorer. Ce personnage était vraiment trop fade. Je crois qu’il aurait été intéressant de développer un peu son passé et celui de sa famille une fois qu’elle retrouve la mémoire (ou grâce aux recherches de ses riches protecteurs). Ça aurait permis d’en apprendre plus sur la migration irlandaise, point qui manquait cruellement à la narration de ce roman selon moi. Quant à Belle, j'ai trouvé qu'elle acceptait trop facilement sa position de victime alors qu'elle aurait pu résoudre de nombreux malentendus en faisant entendre sa voix.

    — Je veux pas être une Blanche, répondis-je, sentant monter la peur en moi. Je veux vivre avec Belle et ensuite je vais épouser Ben ! 
    Fanny, allongée en appui sur les coudes, se redressa pour me regarder dans les yeux.
    — Il vaut mieux que tu oublies cette idée au plus vite. Tu seras jamais noire comme nous, et ça veut dire que t'es une Blanche et que tu vas vivre dans une grande maison. Dans tous les cas, tu peux pas épouser Ben. Il est noir.

       Le problème de ce roman c’est vraiment qu’il ne me semble pas abouti – malgré le nombre de pages pourtant conséquent ! L’écriture est trop brouillonne, on s’arrête sur certains épisodes qui n’apportent rien (l’enfance de Lavinia est vraiment très longue), il y a certaines longueurs et à côté de cela, il y a beaucoup de sujets qui ne sont pas suffisamment explorés : le passé de la famille biologique de Lavinia (les causes de leur exil), les relations entre Marshall et son précepteur. Je pense qu’il aurait été plus judicieux de faire commencer l’histoire quand Lavinia est plus grande et donc plus apte à prendre la parole, à éclairer certains passages et surtout d’en faire un personnage plus charismatique et affirmé.

    E N   C O N C L U S I O N

    ★★★☆☆   

       Si l'idée m'a semblé bonne, j'ai quand même été déçue par la tournure des événements. J'ai trouvé cela trop dramatique, Lavinia connaît tous les malheurs du monde, faisant de l'héroïne une pauvre petite chose pathétique... La fin me laisse sur ma faim et est beaucoup trop bâclée selon moi. Je n'ai pas aimé l'alternance des points de vue et le temps de la narration pour Belle. Par contre j'ai adoré les liens qui unissaient les personnages et là réflexion sur la famille/appartenance ethnique. Selon moi, c'est ce dernier point qui fait la richesse du roman et rien que pour cet aspect, ça vaut la peine de lire ce roman. 7/10

    Stéphanie


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